vendredi 28 février 2014

Kyoto, l'ancienne capitale protégée par la géomancie



Kyoto, l'ancienne capitale protégée par la géomancie

Mayumi UEHIRA
Introduction
            Pendant la période ancienne (kodai古代), le siège impérial (miyakoミヤコ[1]) fut fréquemment transféré au bout de quelques années dans la région de Nara, Osaka et Kyoto. Il faut savoir d'abord ce qu’est la géomancie chinoise , puis comment l'ancien Japon a choisit les sites de ses capitales, pourquoi il en a changé souvent et enfin pourquoi la ville Kyôto est finalement fixée comme la capitale durable pendant 1200 ans.

1.     La cosmologie en Chine
            Vers IIIe siècle avant notre ère, la cosmologie chinoise aboutit à une mise en forme définitive de la théorie du Yin Yang wu xing 陰陽五行(les Cinq Agents ou phases). Les cosmologistes établirent des corrélations reliant les divers repères spatio-temporels célestes et terrestres. Figurée géométriquement sur les tables de divination shi, elle a pour but de permettre de déterminer le "faste" et le "néfaste", ce qui consiste à connaître le cours du monde et par conséquent à savoir ce qu'il convient de faire et de ne pas faire. Cette théorie comprend également une partie dédiée à l'astronomie, sur laquelle s’appuie le calendrier, la médecine et la science naturelle.
            Les anciennes villes étaient également construites selon la théorie de la cosmologie chinoise. On l’appelle le Feng shui風水littéralement "vent et eau", ou en français la géomancie. Selon la cosmologie chinoise dans laquelle le Ciel est conçu comme rond et la Terre, comme carré, l'espace est imaginé sous forme de carrés emboîtés. Les villes chinoises étaient construites en carré marqué par quatre portes aux quatre orients. Les géomanciens sont ainsi chargés de déterminer si la nature du terrain, la configuration du sol, la disposition des arbres, des rochers et des eaux de la région sont favorables aux esprits fastes et capables d'arrêter les esprits néfastes. L'emplacement une fois fixé, on trace son plan sur l'axe principal médian de direction sud-nord. L'espace est aménagé en symétrie par rapport à cet axe. Par ailleurs, pour les Chinois, le nord représentait, outre les rigueurs de l'hiver, le danger des invasions barbares, donc les influences néfastes. Les villes importantes ainsi que tout bâtiment important, officiel ou privé s'ouvrent par conséquent au sud. Pour protéger une ville de ces influences néfastes, il faut une butte ou une colline s'élevant au nord de la ville, une rivière à l'est, un route à l'ouest et un lac ou un étang au sud. L'aménagement de l'espace fut donc toujours soumis à des règles : l'orientation nord-sud, l'axialité et la symétrie. Et les quatre points cardinaux sont protégés par quatre animaux divins : le dragon bleu à l'est 青竜 (seiryû), l'oiseau rouge suzaku朱雀 au sud, le tigre blanc白虎 (byakko) à l'ouest et le gembu玄武 (tortue enroulé d'un serpent) à nord. 
 
2.     L'introduction du Yin-Yang les Cinq Agents 陰陽五行 au Japon
            D'après le Nihon shoki, en 513, les maîtres de cinq sutras sacrés du confucianisme furent envoyés au Japon du royaume de Paekche百済, un des royaumes de Corée. L'un de ces cinq sutras est un livre de la divination portant sur la théorie du Yin Yang les Cinq Agents 陰陽五行. Les maîtres de la cosmologie vinrent de temps en temps de Paikche. Au VIIe siècle, la cour japonaise essayait de plus en plus de l'introduire pour l'appliquer dans le système politique de cette époque. L'empereur Tenmu 天武 (?-686, r. 673-686), essaya positivement de renforcer son pouvoir et d'aménager le système politique. Il introduisit pour la première fois le bureau Yin Yang 陰陽寮[2] dans son système politique.      

3.     L'influence de la géomancie chinoise pour la construction de capitale
3.1.    La palais de Fujiwara et la capitale de Heijôkyô (Nara)
            L'impératrice Jitô持統 (645-702, r. 686-697)[3] introduisit pour la première fois la géomancie chinois. Dans sa cour, les géomanciens étudiaient l'astronomie et la lecture dans les reliefs géographique pour le choix du site du palais et de la date favorable de son transfert. Elle transféra son palais à Fujiwara藤原京(préf. Nara) en 694 et créa une véritable capitale. C'était la première capitale qui imitait à Chang'an長安, la capitale chinoise. Mais elle fut abandonnée au bout de seize ans. L'impératrice Gemmei元明(661-721, r. 707-715)[4] fonda par la suite la capitale à l'actuelle ville de Nara  (Heijôkyô平城京) en 710. Cependant, l'idée que la capitale ne devait pas être déplacée n'était pas encore ancrée dans la cour impériale. Ainsi, son petit-fils, l'empereur Shômu 聖武(701-756, r. 724-749) monta sur le trône à la cour de Heijôkyô平城京, mais à partir de l'année 741 il transféra successivement sa cour vers trois sites : d'abord à Kuni恭仁 (préf. Kyôto), puis Shigaraki 紫香楽 (préf. Shiga) et à Naniwa難波 (ville d'Osaka). En raison du conflit avec la Corée, l'empereur s'éloigna de la mer et rentra finalement à Heijôkyô平城京en 745. La capitale de Heijôkyô平城京 imite parfaitement la capitale Chang'an長安de la dynastie des Tang. C'est-à-dire que l'espace était aménagé en damier grâce aux avenues et aux rues qui traversent du nord au sud ou de l'est à l'ouest. Les quartiers étaient donc en forme carrée. Elle mesurait 4,3 km d’est-ouest et 4,8 km du nord-sud. Comme la capitale du Tang, une grande avenue nord-sud centrale divisait la capitale en deux : la partie est était appelée sakyô左京 et l'autre ukyô右京. Cette avenue partait de la porte Roshômon羅生門 et aboutissait à la porte méridionale Suzakumon朱雀門du palais, porte de l’oiseau rouge, symbole du Sud. La cité administrative et le palais (nairi) s'étendaient au nord. Les édifices étaient réservés aux divers bureaux. Le bâtiment le plus important était le Daigokuden大極殿 (pavillon de l'énergie ki suprême), où se déroulaient les grands rites de la cour. On peut remarquer aussi une évidente influence de l'organisation du palais. Les temples bouddhistes étaient établis dans la ville ou sur les confins de l'est et du sud. Le bouddhisme et son art y étaient florissant. Tous ces édifices ordonnées et colorés donnaient un aspect majestueux et éclatant à la capitale, comme en témoigne un fameux poème japonais waka de l'époque : "Aoniyoshi Nara no miyako ha あおによし奈良の都は….(Nara aux couleurs éclatantes, comme fleurs qui s'épanouissent odorantes, dans sa pleine beauté)[5]" 

3.2.    Raison d'abandonner la capitale Heijôkyô (Nara)
            Le bouddhisme était protégé par l'Etat à l'époque Nara. En effet, l'empereur Shômu聖武et son épouse Kômyô 光明étaient très dévots. On considérait que la religion assurait la prospérité et la sécurité de la cour impériale ainsi que le peuple et le pays. L'entrée de moines dans l'Etat était soumise à l'autorisation officielle. Le successeur de l'empereur Shômu聖武 était sa fille l'impératrice Shôtoku称徳 (718-770, r. 764-770)[6]. Elle étaient très influencée d'abord par sa mère, puis par Dôkyô 道鏡(?-772), un moine qui, avait obtenu à la fois les titres les plus hauts dans le domaine religieu et dans la hiérarchie civile : il était prince de la Loi bouddhique et révérend ministre des Affaires suprêmes. Il fit entrer son frère dans le conseil des hauts dignitaires. Mais à la mort de l'impératrice Shôteku称徳, Dôkyô道鏡fut exilé et le Conseil choisit pour empereur un prince, petit-fils de l'empereur Tenji天智, en évitant les descendants de l'empereur Tenmu天武 et l'impératrice de Jitô持統[7]. Ce fut le futur empereur Kônin 光仁(709-781, r. 770-781). Lorsque son fils, l'empereur Kanmu桓武(737-806, r. 781-806) monta au trône, aucun moine ne put plus obtenir une fonction de l'administration civile. L'empereur Kanmu 桓武 commença son régime par une série de réformes. Dès 784, il essaya d'abord de déplacer la capitale à Nagaoka (préf. Kyôto). Il voulait probablement éviter la capitale de Nara fortement marquée par les influences de descendants de l'empereur Tenmu天武 et des monastères bouddhistes. Il voudrait aussi avoir un accès plus facile au port de Naniwa難波 (Osaka) par la voie fluviale.

3.3.    Raison d'abandonner la capitale Nagaoka長岡京(préf. Kyôto)
            En juin 784, l'empereur nomma Fujiwara Tanetsugu藤原種継 (737-785), responsable de la construction de la nouvelle capitale, Nagaokakyô長岡京, mais Tanetsugu 種継fut assassiné en 785. L'empereur Kanmu桓武arrêta et exécuta sans tarder deux aristocrates du clan Ootomo 大伴qui étaient contre lui. Il arrêta aussi son vrai frère Sawara早良, prince héritier du trône, qui était proche des Ootomo大伴. Celui-ci prétendit qu'il était innocent. L'empereur ne lui crut pas, lui enleva le titre de prince héritier et le condamna au bannissement sur l'île d'Awaji淡路島. Le prince Sawara 早良protesta contre cette décision en jeûnant et mourut sur la route de l'île d'Awaji淡路島. Sa dépouille y fut quant-même emportée et enterrée. Après la mort du prince Sawara早良, il arriva malheur sur malheur dans la famille impériale. L'empereur perdit successivement ses proches : sa propre mère et ses deux épouses. De plus, le prince héritier Ate安殿, son propre fils souffrait d'une malade inconnue. Quant aux catastrophes naturelle, elles se produisirent aussi : en 788, le pays fut frappé par une grande sècheresse. Pour comble du malheur, la nouvelle capitale subit deux fois en 792, une grande inondation de la rivière Katsura桂川. Les anciens japonais croyaient que les malheurs arrivaient à cause des ressentiments très forts des défunts qui, tout en étant innocents, avaient été condamnés à mort ou étaient morts dans un lieu de déportation. On ne connait cependant pas la véritable raison d'abandonner cette capitale, mais ces malheurs firent penser aux gens que le Nagaokakyô長岡京 était maudit par le Prince Sawara早良 et les autres victimes de la famille impériale de Kanmu桓武. L'empereur renonça finalement au projet de Nakaokakyô長岡京 et envoya à la province de Yamashiro山背[8] (ville actuelle de Kyoto) un groupe de recensement, dirigé par le vice ministre (Dainagon大納言), Fujiwara no Oguromaro藤原小黒麻呂.  

4.     Le Heiankyô平安京, la capitale de 1200 ans
            L'empereur Kanmu桓武 décida de transférer en 794 la capitale à l'actuelle ville de Kyoto. On l'appelle "Heiankyô平安京".

4.1.    Choix du site de la capitale平安京
            La parole de l'empereur Kanmu est citée dans le Nihon kiryaku日本記略, édité en 794. Elle dit que "la province de Yamashiro山背est entourée d’ une chaîne de collines et des rivières qui forment une muraille naturelle. Il faut adopter les caractères chinois "山城" (littéralement "le château de montagnes") à son nom Yamashiro. Et la nouvelle capitale à construire s'appellera "Heiankyô平安京". En effet, il y des chaînes montagneuses entourant la capitale à l'est, au nord et à l'ouest comme un col de vêtement. Les montagnes les plus élevés se trouvent à symétriquement au nord-est et au nord-ouest : le mont Hiei 比叡山et le mont Atago愛宕山. Le sanctuaire Atago 愛宕神社se trouvant au sommet du mont Atago protège aussi la direction nord-ouest de la capitale.
            C'est également un site favorable à recevoir les protections de quatre animaux spirituels des points cardinaux. Il y a la butte de Funaoka船岡山 au nord de la capitale, le grand étang d'Ogura巨椋池 au sud, la rivière Kamo 鴨川à l'est et les routes San-in 山陰道et Sanyô山陽道 à l'ouest. De plus, comme pour l’ancienne capitale de Nara, il y a trois collines, y compris la butte de Funaoka 船岡山au nord, qui entourent la nouvelle capitale. il s'agit de la butte de Yoshida 吉田山au nord-est et la butte de Narabigaoka双ヶ丘 au nord-ouest. Sur les sommets des buttes, les sanctuaires shintô protègent aussi le Heiankyô. Le sanctuaire Yoshida sur la butte de Yoshida est considéré comme une lieu où le dragon bleu (le divinité protectrice de l'est) descend du Ciel ou rentre au Ciel.    

4.2.    Les autres protections spirituelles pour le Heiankyô 平安京
            L'empereur Kanmu ne se satisfaisait pas seulement de la protection par la géomancie chinoise. Il plaça et déifia les immenses rochers sacrés ou iwakura 岩倉dans des collines des quatre points cardinaux. Il s'agît des supports shintô神道 sur lesquels les divinités descendent. Ces divinités shintô protégeront la nouvelle capitale. Les iwakura 岩倉se trouvent au nord dans l'actuel sanctuaire Yamazumi山住神社, au sud dans le temple Myôôin明王院, à l'est dans le temple Kanshô-ji 観勝寺et à l'ouest dans le temple Kinzô-ji金蔵寺.
            De plus, l'empereur construisit aussi dans chaque direction, quatre sanctuaires shintô vénérant la même divinité militaire et protectrice de la capitale, Susanoo no mikoto 素戔嗚尊. Ces sanctuaires s'appellent  "Sanctuaire Daishôgun (Grand Général)大将軍神社".           
            Le plus important est de protéger la direction de nord-est, appelée "kimon 鬼門" , littéralement "porte d'oni ('êtres diaboliques)". Selon la voie de Yin yang, les courants spirituels maléfiques ont tendance à converger dans cette direction et les esprits maléfiques s'introduisent donc facilement par cette direction. On croyait qu'on peut s'en protéger en vénérant une divinité shintô ou bouddhiste placée dans cette direction. L'empereur Kanmu plaça  des triples barrières spirituelles au kimon 鬼門 : il fit renouveler  les sanctuaires de Kamigamo 上賀茂神社et de Shimogamo 下賀茂神社et plaça le complexe bouddhiste d'Enryaku-ji延暦寺 au sommet du mont Hiei比叡山en 788. De plus, le temple Sekizan zen'in 赤山禅院 se trouvant au pied du mont Hiei est aussi considéré comme un des temples gardiens de la direction nord-est (kimon鬼門). Sur le toit de son édifice principal, un singe en céramique surveille la capitale. On croyait que le singe a la capacité d'enfermer un mauvais esprit.   

4.3.    L'aménagement de la capitale
            La capitale de Heiankyô imite aussi la capitale Chang'an de la dynastie de Tang, mais sa superficie (26,79km2) était environ un tiers de Chang'an. Elle mesure 4,5km de l'est à l'ouest et 5,2km du nord au sud. Comme la capitale de Heijôkyô平城京, on y adapte l'urbanisme chinois. On construisit cette nouvelle capitale comme la capitale de Nara. L'espace est aménagé en damier et une grande avenue nord-sud centrale, appelée Suzaku-ooji朱雀大路, de 84 m de large, divisait la capitale en deux : la partie est était appelée sakyô左京 (capitale gauche) et l'autre ukyô右京 (capitale droite)[9]. L'ukyô右京 avait le modèle de Chang'an長安 et le sakyô左京, Rakuyô洛陽, (Luoyang[10] de Henan河南省 en Chine). La partie ouest ou L'ukyô右京, ayant des terrains marécageux, disparut malheureusement progressivement. La ville de Kyôto porte même encore aujourd'hui cet autre nom "Raku洛陽". La partie nord de Kyôto s'appelle donc "Rakuhoku"洛北, l'est "Raku洛東"...   
            La grande avenue Suzaku-ooji朱雀大路partait de la porte Roshômon羅生門 et aboutissait à la porte méridionale Suzakumon朱雀門 (porte d'oiseau rouge) de la cité administrative (Heian-gû平安宮) comprenant le palais impérial ou nairi. Le Heian-gû平安宮s'étendait au nord de la capitale. Le bâtiment le plus important dans le palais impériale, nairi s'appelle Daigokuden大極殿 (Pavillon de l'énergie ki suprême)[11], où se déroulaient les grands rites de la cour. Le sanctuaire Heian jingu 平安神宮fut construit en 1895, d’après le modèle de ce pavillon à l’occasion du 110e anniversaire du transfert de la capitale à Kyôto[12].  
            L'espace était aménagé en damier par les avenues et les rues qui traversent du nord au sud ou de l'est à l'ouest. Les quartiers étaient donc en forme carrée. A la différence du Heijôkyô de Nara, l'empereur Kanmu n'accepta de construire aucun temple bouddhiste à l'intérieur de la capitale, sauf deux temples d'Etat pour protéger le pays : le Tôji東寺 et le Saiji西寺. Le Saiji 西寺se disparu avec la partie ouest (l'ukyô右京) de la capitale. Le temple Tôji 東寺seulement existe encore aujourd'hui.
           
4.4.    La protection spirituelle de la cité administrative, Heian-gû平安宮
            La cité administrative (Heian-gû平安宮) était protégée également grâce aux animaux divins, protecteurs des points cardinaux. Dans la direction prolongée de la grande avenue Suzaku-ooji朱雀大路 vers le nord, il y a la butte Funaokayama船岡山 de gembu 玄武, protecteur du nord.
           Au sud de la cité, se trouvait un bois ayant un grand étang symbolisant l'oiseau rouge suzaku朱雀, protecteur du sud. On appelle "Shinsen-en神泉苑". C'était originellement un bois naturel ayant un grand étang avec un îlot et quelques sources d'eau. On l'aménagea en y construisant quelques pavillons conformes à la géomancie. L'étang fournissait aux habitants de l'eau potable. Le Shinsen-en神泉苑" était très vaste: il se trouvait entre les rue de Nijô et de Sanjô, et entre les rues d'Oomiya et de Mibu. Un quart de sa superficie fut intégrée dans le château de Nijô et le Shinsen-en 神泉苑 se réduit aujourd'hui à 8 % de l'original.
            La rivière Horikawa堀川 (littéralement la rivière creusée) se déroulait à l'est de la cité " Heian-gû平安宮.Il s'agit d'un canal percé au moment de la construction de la capitale. Au long de la grande avenue centrale de Suzaku (朱雀大路), il y avait deux canaux à chaque côté. Ils s'appelaient respectivement "Horikawa" de l'est et "Horikawa" de l'ouest. Ce qui existe aujourd'hui est celui de l'est. Le Horikawa de l'ouest changea son cours avec la décrépitude de la partie ouest de la capitale. Il devient aujourd'hui la rivière Kamiya紙屋川.  
            La cité administrative (Heian-gû平安宮) n'existe plus aujourd'hui, et le palais impérial "Gosho御所" se trouve dans un site différent de l'ancien. Le nord-est (kimon ) du palais sont camouflé par deux angles pour tromper les esprits maléfiques. De plus, un singe sculpté est placé comme gardien de cette direction. Il vient du sanctuaire de Hie日枝神社, protecteur du temple Enryaku延暦寺. Il est enfermé dans le filet, car une légende dit qu' il se promenait et faisait une farce tous les nuits.

5.     Les mesures prises contre les défunts rancuniers
            Après le transfert de la capitale à Kyôto, les fléaux continuaient à se produire. On les considérait comme des malédictions causées par des défunts qui, étant l'objet d'une fausse accusation, avaient été déportés ou enfermés, et moururent avec un ressentiment très fort. L'empereur Kanmu桓武 s'effrayait toujours de la malédiction liée à Sawara, à son demi-frère Osabe 他戸, prince héritier, et à la mère de ce dernier, la princesse Inoe井上. La princesse Inoe était une des épouse de son père, l'empereur Kônin光仁. Elle était accusée d'avoir jeté un maléfice de mort à l'empereur Kônin. On lui enleva son grade de princesse et aussi celui de son fils le prince Osabe et on les enferma. Ils moururent le même jour en 775.  Ils ont été probablement assassinés. C'était probablement une conspiration de Fujiwara no Momokawa藤原百川 qui avait proposé le prince Yamabe山部 (le futur empereur Kanmu桓武) comme l'héritier de l'empereur Kônin光仁.
            L'empereur Kanmu桓武 prit plusieurs mesures pour apaiser ces esprits maléfiques. Il envoya plusieurs fois des moines sur l'ile d'Awaji afin d’organiser des prières pour apaiser l'âme de Sawara早良. En 800, il conféra au prince Sawara早良 le grade d’empereur. Désormais celui-ci s'appella l'empereur Sudô. Il construisit une tombe tumulus pour son frère à Awaji et édifia un sanctuaire seulement pour lui 神社. Plus tard, on refit son tumulus à Nara. On craignait vraiment la malédiction de Sawara早良.
            Quant à son demi-frère Osabe 他戸, prince héritier et à la mère de ce dernier, la princesse Inoe井上, l'empereur Kanmu桓武 leur rendit leurs titres en 777 et refit leurs tombes. En 800, il conféra à Inoe井上, le titre de reine-mère.
            Dans la ville de Kyôto, plusieurs sanctuaires déifient l'empereur Sudô, la princesse Inoe井上, le prince Osabe 他戸 ainsi que d'autres âmes rancunières. On appelle ce type de sanctuaire Goryô jinja御霊神社. Par exemple, comme sanctuaires Goryô jinja御霊神社, il y a le Kami Goryo jinja 上御霊神社, le Shimo Goryo jinja下御霊神社, ou le Fujinomori jinja 藤森神社de l'arrondissement Fushimi伏見.
            Au cours de l'histoire de la capitale, plusieurs sanctuaires Goryô jinja御霊神社 furent construit pour apaiser les autres âmes. Par exemple, les sanctuaires Tenman-gû天満宮 pour Sugawara no Michizane菅原道真, le sanctuaire Shiramine白峰神宮 pour l'empereur Sutoku崇徳(1119-1164, r.1123-1141), qui fut déporté dans la province de Sanuki, après avoir été vaincu au moment la guerre de Hôgen保元の乱 et et qui mourut en 1164.      

Les sanctuaires Gôryô 御霊神社à la capitale de Heiankyô平安京 et à ses environs

            Lorsque des fléaux frappait la capitale et la cour impériale, l'empereur organisait le "Goryô-e御霊会" pour apaiser ces âmes maléfiques dans leurs sanctuaires et dans le bois de Shinsen-en神泉苑. Le Goryô-e le plus connu dans l'histoire fut organisé en 863 dans le bois de Shinsen-en 神泉苑, pour apaiser L'âme de l'empereur Sudô, de la princesse Inoe井上,et du prince Osabe 他戸… Le "Goryô-e御霊会" consistait en prière de moines et de géomanciens, en danses accompagnées de musique (bugaku舞楽 et gagaku雅楽) et en spectacles d’acrobatie ou de jonglage… A la fin de l'époque, le peuple commençait à organiser les "Goryô-e御霊会" dans les sanctuaires, comme le sanctuaire Yasaka Jinja八坂神社. Pour le peuple, c'était une bonne occasion de s'amuser de spectacles.

Conclusion.
            Au cours de l'époque Heian平安時代, la géomancie influençait beaucoup la vie des nobles. Le bureau de la géomancie de la cour avait créé chaque année le calendrier en indiquant les jours et la direction néfaste ou faste. Si le jour était néfaste, on restait tranquillement à la maison. Si la direction de déplacement était néfaste, on allait d'abord vers l'autre direction faste et ensuite vers la destination définitive. Le clan des Kamo s'occupaient de génération en génération des postes responsables dans le Bureau de Géomancie de la cour impériale. Mais, le géomancien le plus connus du Japon était Abe no Seimei 阿部清明dont  je vais parler pour la prochaine fois. 
            La géomancie se développa au Japon au cours des siècle en changeant sa forme. Même les seigneurs de l'époque des Provinces en Batailles (戦国時代) consultaient la divination pour faire des batailles. Aujourd'hui, la géomancie s'installe dans la vie quotidienne de sorte qu'on ne connait pas son origine, par exemple les fêtes saisonnières comme le Setsubun節分 du 3 février, la fête de filles (Hinamatsuriひな祭り) du 3 mars, le Tanabata七夕 du 7 juillet. En outre, lire le plan de maison, la horoscope chinoise. Par ailleurs, la grande fête de Gion 祇園祭りétait aussi à l'origine organisée pour apaiser les âmes rancunières de l'empereur Sudô崇道(prince Sawara早良) et des autres défunts, victimes de fausses accusations. 


Bibliographie :
Ø  Francine Hérail (ss dir.), L'Histoire du Japon, des origines à nos jours, Hermann Editeurs, Paris, 2009
Ø  Flora Blanchon, Isabelle Robinet, Jacques Giès, André Kneib, Art et histoire de Chine vol. 2, Presse de l'Université de Paris-Sorbonne, 1999, Paris
Ø  Makoto TAKEMITSU武光誠, Sugu wakaru Nihon no jujutsu no rekishi すぐわかる日本の呪術の歴史(Histoire de la magie maléfique au Japon), Tokyo bijutsu, 2001
Ø  Shigekazu MEZAKI目崎茂和, Kyo no fûsui meguri 京の風水めぐり(promenade dans la ville de Kyôto selon la géomancie), Tankôsha, 2002 (en japonais).
Ø  Atelier Kasha か舎工房et Masaharu KIKUCHI菊池昌治, Kyoto no makai o iku 京の魔界を行く(Se promener dans le monde de ténèbres de Kyôto), Shôgakukan, 1999 (en japonais).
Ø  Satoshi SHIMIZU清水さとし, Kyôto Naruhodo jiten京都なるほど辞典, (Le Petit dictionnaire de Kyôto), Jitsugyou no Nihonsha, 2002 (en japonais).
Ø  Osamu et Haruko WAKITA 脇田修 脇田晴子(ss dir.), Monogatari, Kyoto no rekishi 物語京都の歴史(L'histoire du Kyoto), Chûkô shinsho, 2008 (en japonais).






[1] Le mot ancien "miyakoみやこ" est crée par deux mots "miya" et "ko". Le miyako veut dire litéralement le site où il y a un palais impérial. On adapte plus tard la caractère chinois (miyako) ou (kyô) 
[2] Le Yen Yang 陰陽est prononcé au Japon : "Ommyô".
[3] Elle était la fille de l'empereur Tenji天智 et l'épouse de l'empereur Tenmu天武.
[4] Elle était la quatrième fille de l'empereur Tenji天智et l'épouse du Prince Kusakabe草壁皇子, fils de l'empereur Temmu天武 et l'impératrice Jitô持統.
[5] compilé dans Man yôshû 万葉集(livre 3, poème 328)
[6] Elle était la fille de fille de l'empereur Shômu聖武 et son épouse Kômyô 光明monta à la trône deux fois. Elle se nomma l'impératrice Kôken孝謙pour son premier règne (749-758).
[7] L'empereur Tenji天智 et l'empereur Tenmu天武 étaient frères. L'impératrice Jitô持統 était fille de Tenji天智 et épouse de Tenmu天武. Tenji天智 céda le trône à son premier fils Ôtomo 大友皇子(l'empereur Kôbun弘文). Mais après la mort de Tenji, Tenmu s'empara par la force du pouvoir de haute lutte en 672. On appelle ce conflit "Jinshin no ran 壬申の乱ou les troubles de l'année aîné de l'Eau et du Sange".           
[8] Le Yamashiro山背 veut dire "derrière des montagne" par rapport à la capitale de Nara, Heijôkyô.
[9] Par rapport du palais impériale.
[10] Luoyang 洛陽 était la capitale des Wei septentrionaux. A l'époque des Tang, cette ville est catégorisée comme la capitale est de la dynastie par rapport à la capitale Chang'an長安.
[11] Le pavillon Daigokuden大極殿 fut brûlé en 1177 et ne fut pas reconstruit. 
[12] Le sanctuaire se mesure environ cinq huitième de la pavillon Daigokuden大極殿.

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